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Dirigeants d’entreprises : pourquoi l’essor des contrats de prévoyance collective ?

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Depuis une quinzaine d'années, le marché de l’assurance collective est en plein essor. Une étude contextuelle de 2020 a été réalisée par le cabinet Facts & Figures en expliquant le poids grandissant de l’assurance collective au regard de l’assurance individuelle, hors assurance dommage. On observe une accélération depuis 2016, en raison de la généralisation de la complémentaire santé dans les entreprises. Dans la mesure où la Sécurité sociale protège tous les salariés, pour quelles raisons a-t-on besoin de se protéger plus avant ? Quels sont les facteurs qui pourraient expliquer cette hausse ? Notre expert en protection sociale Pascal Ronzon, répond à ces questions.

Protection sociale complémentaire : une évolution réglementaire pour l’entreprise

Portrait Pascal R.
Par Pascal Ronzon, expert en prévoyance collective

Le régime frais de santé en entreprise obligatoire depuis le 1er janvier 2016

Qu’est-ce qu’un régime de prévoyance collective ? Il s’agit des contrats de groupe, c’est-à-dire des contrats souscrits par les entreprises au profit de leurs salariés afin de garantir le remboursement des frais de santé d’un côté et d’inclure de la prévoyance de l’autre, c’est-à-dire de garantir le décès, l’incapacité de travail et l’invalidité des salariés.

La Loi sur la Flexisécurité de juin 2013 prévoit dans son chapitre 1er l’obligation pour les entreprises de proposer un contrat collectif de couverture des frais de santé, moyennant la participation de l’employeur à hauteur de 50 % du montant du prix de l’assurance.

Cette loi crée une obligation d’assurance de groupe qui n’existait pas jusqu’alors, sous la forme d’une obligation réglementaire. Elle vient compléter des dispositifs d’origine conventionnel et que l’entreprise se devait respecter.

Depuis plus de 30 ans, les premiers dispositifs conventionnels prévoyaient une assurance collective sur le champ de la prévoyance. La loi sur l’assurance santé en entreprise renforce les dispositifs conventionnels et accélère la mise en place des régimes d’entreprises.

Loi El Khomri : mise en place des garanties de prévoyance par accord de branche

Le législateur favorise le rôle des branches depuis la Loi El Khomri du 8 août 2016 dite loi Travail et vient compléter la loi ayant généralisée la complémentaire santé en entreprise. Les branches jouent un rôle régalien, c’est-à-dire un rôle de protection et dès lors, le développement du rôle des branches s’effectue sur le champ du social, dont la protection sociale. Les partenaires sociaux négocient des accords conventionnels permettant de prévoir des garanties collectives.

Ces accords dont la plupart sont étendus, c’est-à-dire publiés au Journal officiel (JO), s’imposent aux entreprises et contribuent à la mise en place des contrats d’entreprises.

Le droit à la portabilité

Créé en 2008, ce droit a été amélioré en 2013. C’est un droit obligatoire pour tous les salariés. Il permet de bénéficier d’une couverture gratuite en cas de besoin dont l’origine est le contrat collectif. Ce droit favorise la protection du salarié et la mise en place des contrats collectifs.

Cette place du réglementaire a du sens parce qu’il y a une volonté politique. En quoi le système politique joue un rôle dans le développement de l’assurance collective ?

L’assurance collective pour pallier les inégalités sociales de santé

Une aide complémentaire à la Sécurité sociale

Il est important de préciser que la volonté politique est de maintenir un système dual en France. Un système dual est un système à 2 étages construit volontairement ainsi depuis 1945 : un système de base pris en charge par la Sécurité sociale et un système de prévoyance complémentaire dont les acteurs sont les assureurs, les mutuelles et les Institutions de prévoyance.

Il est donc acquis que le remboursement de la Sécurité sociale n’est pas intégral et quune couverture complète nécessite la souscription d’une assurance complémentaire.

En frais de santé et hormis le cas des affections longues durées, le ticket modérateur est laissé à la charge des assurés et donc des complémentaires santé.

Par exemple : en cas d’arrêt de travail : la Sécurité sociale maintient un revenu à hauteur de 50 % du salaire Tranche A dans la limité de 1,8 smic (maximum 48,64 €/jour au 1er mai 2022). Cela veut dire que la complémentaire prévoyance intervient pour garantir un maintien de salaire le cas échéant selon le contrat souscrit.

Les avantages d’une prévoyance complémentaire pour les entreprises

Une fiscalité avantageuse

La souscription d’un contrat collectif est favorisée par une fiscalité avantageuse tant au niveau des taxes que de la fiscalité directe pour les entreprises. C’est ainsi qu’un contrat frais de santé responsable bénéficie d’une réduction de la taxe sur les contrats d’assurance (TSCA).

Mais plus encore, l’entreprise bénéficie de l’application de l’article 39 du Code général des Impôts. C’est-à-dire que le coût de la participation employeur à un contrat collectif est déductible de ses charges ! Cet avantage fiscal est important et représente une « niche » qui coûte quelques milliards aux finances publiques. Le maintien de cette niche fiscale favorise le développement des contrats collectifs, tant en santé qu’en prévoyance.

Un outil de dialogue social

La fiscalité joue un rôle dans le développement de l’assurance collective. Le politique souhaite mettre l’entreprise au cœur du dispositif social et favorise la protection du salarié.

L’entreprise a l’obligation de mettre en place un contrat collectif santé. Le champ social est laissé à la main des entreprises. Le politique favorise le fait que c’est l’entreprise qui doit être au cœur de la couverture assurantielle de ses salariés pour la protection sociale. C’est pourquoi les entreprises s’intéressent de plus en plus à l’assurance collective. Elle est devenue petit à petit un périphérique à la rémunération, source de dialogue et de compromis.

La réduction des inégalités

Pour finir, l’assurance collective est un moyen de réduire les inégalités au sein d’une profession ou au sein d’une entreprise. Si l’entreprise propose un contrat de groupe, elle le propose à tous ses salariés. Ainsi, tous disposent de la même couverture, indépendamment de la situation personnelle de chaque salarié. Il n’y a donc moins de discriminations ou de renoncements à une couverture assurantielle dès lors que l’assurance collective est mise en place par l’entreprise.

Les avantages d’une prévoyance complémentaire pour les salariés

La négociation collective d’une garantie de prévoyance ou/et de santé peut se conclure par la mise en place d’un contrat de groupe au profit des salariés. Les paramètres utiles qui facilitent la négociation sont la recherche d’un niveau de garanties acceptable par tous et le souhait de se conformer aux obligations légales de l’employeur.

Un avantage social

L’entreprise est souscriptrice des contrats de groupe car le contrat collectif de santé ou de prévoyance constitue un avantage social indéniable. Quel que soit le formalisme de mise en place du contrat de groupe dans l’entreprise (i.e. une décision unilatérale de l’employeur, des accords collectif ou un référendum pour reprendre les trois formes acceptées), le salarié bénéficie des mêmes garanties que son collègue et surtout du même prix.

Une participation employeur réduisant le coût à la charge du salarié

Il faut compléter notre analyse par le fait de dire que la participation de l’employeur contribue à l’essor de l’assurance collective car c’est un avantage que l’on n’a pas si l’on n’est pas un salarié.

La participation de l’employeur au financement des garanties est un plus. Cette participation est obligatoire dans le cadre d’un contrat santé et doit être significative dans le cadre d’un régime de prévoyance.

Le mot significatif voulant signifier que la participation de l’employeur doit être au minimum au même niveau que sa participation au régime de retraite obligatoire ou respecter les dispositifs conventionnels le cas échéant. La participation de l’employeur réduit le coût total à la charge du salarié. Cette participation de l’employeur correspond à un montant mensuel et son taux est variable d’une entreprise à l’autre, en fonction souvent du secteur d’activité, sauf dans le cadre d’un accord conventionnel.

Certaines entreprises améliorent leur taux de participation car ce taux s’inscrit dans une politique de rémunération globale. Aujourd’hui, dans les entreprises, la rémunération globale est constituée d’une rémunération fixe à laquelle on ajoute certains avantages sociaux dont les contrats d’assurance collective.

Les différences entre une assurance collective et un contrat individuel

Tout comprendre sur les aspects tarifaires

L’assurance collective est une assurance de groupe, c’est-à-dire que la tarification réalisée est une approche collective. L’âge de la personne, sa charge de famille individuelle et ses revenus ne sont pas pris en compte individuellement.

Une fois la tarification établie, la progression de la cotisation ne se fait pas en fonction de l’âge de la personne. Le tarif est unique pour toutes les personnes d’une même entreprise, que la personne ait 25 ou 50 ans. Cette approche collective tarifaire est donc plus avantageuse qu’une assurance individuelle, qui elle, va évoluer selon l’âge du collaborateur.

Les services associés au contrat d’assurance

L’autre différence concerne les services associés au contrat d’assurance. En assurance collective, les entreprises demandent des services complémentaires relatifs à la prévention et à la qualité de vie au travail. Plus explicitement, il est admis que la prévention est le parent pauvre des politiques publiques de santé et que la prévention réalisée par chacun diminue avec l’âge. L’entreprise a donc la préoccupation de pouvoir offrir des services de préventions dans le cadre de sa politique sociale.

Exemple : l’entreprise peut favoriser, dans le cadre de son contrat collectif l’aide au retour à l’emploi après le suivi d’un protocole thérapeutique important, ou mettre à disposition de ses salariés un axe de prévention des risques cardio-vasculaires.

Nous venons de développer différents aspects qui favorisent l’assurance collective. Le réglementaire, la volonté politique et l’entreprise sont autant d’éléments qui participent au développement de l’assurance collective depuis une quinzaine d’année. 2016 a été une étape avec la généralisation de la complémentaire santé en entreprise. Cette date a été un phénomène amplificateur dans le développement de l’assurance collective..

La fiscalité avantageuse des contrats collectifs et le développement des régimes conventionnels négociés par les branches professionnelles datent d’avant 2016 et permettent aux entreprises de mettre en place des contrats collectifs au profit des salariés. Ces contrats collectifs sont plébiscités par les salariés selon des études menées par les assureurs eux-mêmes et certaines entreprises y voient la possibilité de se différencier et de mener une tactique identitaire. Ce phénomène pourrait s’amplifier dans les années à venir.

Vous êtes à la recherche d’un contrat de prévoyance collectif pour votre entreprise ?