Lors d’une création de société, les dirigeants se tournent majoritairement vers deux formes sociétales :
- La Société par action simplifiée (SAS), qui a la particularité de conférer au président le statut d’assimilé-salarié, lui faisant bénéficier de la même protection qu’un salarié en matière de prévoyance et de retraite
- La société à responsabilité limitée (SARL), où le gérant majoritaire bénéficie du statut de travailleur indépendant
Autrefois majoritaire, le statut des travailleurs non-salariés (TNS) perd aujourd’hui du terrain alors même qu’il présente l’avantage d’être moins onéreux. En pleine crise sanitaire, où le mot d’ordre de nombreux dirigeants est de réaliser des économies, opter pour la gérance majoritaire peut être une solution adaptée.
Gérant majoritaire de SARL : un statut délaissé
La SAS est aujourd’hui plébiscitée par les créateurs de sociétés, qui délaissent les SARL. Ce succès s’explique doublement :
La gestion imparfaite du régime social des indépendants
Face aux dysfonctionnements du RSI ayant entraîné des conséquences parfois dramatiques pour ses assurés, les dirigeants ont eu tendance à se tourner vers le statut d’assimilé-salarié afin d’être affiliés au régime général de la Sécurité sociale et ainsi éviter ces problèmes de gestion. Cette crainte n’a cependant plus lieu d’être : les défaillances du RSI, ont entraîné son démantèlement progressif dès 2018. Depuis 2020, les travailleurs indépendants sont eux aussi rattachés au régime général.
Les dividendes ne sont pas soumis à charges sociales dans les SAS …
Depuis 2013, les gérants majoritaires de SARL, soumis à l’impôt sur les sociétés voient leurs dividendes assujettis à charges sociales lorsqu’ils dépassent 10 % du capital social, ce qui n’est pas le cas dans le cadre d’une SAS. Cette disposition avait été adoptée pour éviter les phénomènes d’optimisation, consistant pour certains libéraux à déclarer des revenus professionnels très faibles et à se rémunérer essentiellement sous forme de dividendes, assujettis à l’époque aux seuls prélèvements sociaux sur les revenus du capital.
Aujourd’hui, cette inégalité de traitement entre SARL et SAS pose question. Un rapport du haut conseil du financement de la protection sociale, publié en septembre 2020, préconise à ce titre « d’étendre les dispositions « anti-abus » applicables depuis 2013 aux gérants majoritaires de SARL à l’ensemble des dirigeants de sociétés ».
En clair : à terme, les dividendes des assimilés-salariés seront assujettis à charges sociales.
… mais les indépendants bénéficient d’une plus grande marge de manœuvre.
En comparaison avec les dirigeants-salariés, les indépendants ont une marge de manœuvre plus grande car le poids des cotisations sociales obligatoires est moins élevé et se réduit au fur et à mesure que leur rémunération augmente.
Lien vers l’infographie spéciale “La Prévoyance des gérants majoritaires”
Stratégie de rémunération : les dividendes
Les dirigeants de sociétés disposent de la faculté d’optimiser leur rémunération. En effet, ils peuvent choisir de se rétribuer soit sous forme de rémunération, soit sous forme de dividendes, soit d’une combinaison des deux. De ce choix résultent différents régimes fiscaux et sociaux.
En raison de l’évolution constante de la règlementation sociale et fiscale, l’arbitrage entre rémunération et dividendes est une question à étudier de façon récurrente. La technicité de ce point nécessite les conseils d’un professionnel.
Régime fiscal des dividendes
Par principe, les dividendes sont imposés au prélèvement forfaitaire unique (PFU). Le contribuable peut toutefois opter, sur option, pour l’imposition des dividendes au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Attention, ce choix est irrévocable.
Dividendes soumis au prélèvement forfaitaire unique.
S’agissant des dividendes versés aux associés personnes physiques, la dernière modification conséquente est issue de la loi de finances pour 2018, qui modifie leur régime fiscal en instaurant le prélèvement forfaitaire unique, également appelé « flat-tax ». Le PFU, d’un taux de 30 %, inclut l’impôt sur le revenu au taux de 12,8 % et les prélèvements sociaux au taux de 17,2 %.
Le PFU est basé sur le montant brut des revenus, sans aucune déduction au titre des frais et charges. L’abattement de 40 % sur les dividendes n’est pas applicable si le contribuable choisit cette option.
Dividendes imposés à l’impôt sur le revenu.
Pour l’imposition de leurs dividendes, les contribuables ont également la possibilité d’opter pour l’impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Il faut alors déclarer le montant de ses dividendes en appliquant un abattement de 40 % sur leur montant brut, déduire la contribution sociale généralisée (CSG) à hauteur de 6,8 %, puis soustraire les frais déductibles (frais de garde, d’acquisition, etc.). Ce montant est ensuite additionné aux autres revenus du foyer fiscal pour être soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu.
Régime social des dividendes
Les dirigeants indépendants de sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés peuvent voir leurs dividendes soumis à cotisations sociales. Cette taxation intervient lorsque la part distribuée aux associés excède 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant d’associé appartenant au dirigeant non-salarié et à sa famille (conjoint, pacsé et enfants mineurs non émancipés).
Quand le montant des dividendes est inférieur à 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant d’associé, il est soumis aux prélèvements sociaux de 17,20 %.
Question
Dans quelle mesure les dividendes sont-ils pris en compte dans le calcul de l’assiette du revenu du TNS servant à la détermination du montant des cotisations sociales ?
L’article L.131-6 du code de la Sécurité sociale précise l’assiette du revenu du TNS qui doit être soumise à cotisations : « l’assiette des cotisations (…) est constituée des revenus d’activité indépendant à retenir pour le calcul de l’impôt sur le revenu ». Dans un souci d’uniformisation, l’administration estime que les dividendes doivent être pris en compte avant l’abattement fiscal de 40 %. En d’autres termes, les dividendes soumis au barème progressif de l’impôt sont soumis à cotisations dans leur intégralité, alors même que l’assiette retenue pour le calcul de l’impôt sur le revenu bénéficie de l’abattement de 40 %. Plusieurs professionnels du chiffre se sont soulevés contre cette interprétation de l’administration.
Vers un revirement de jurisprudence ? Un arrêt du tribunal judiciaire de Melun du 12 mai 2020 a donné raison à un contribuable ayant opté pour le barème progressif de l’impôt qui avait assis ses cotisations sociales sur 60 % du montant des dividendes bruts. L’URSSAF n’a pas fait appel du jugement. Affaire à suivre, donc.
Source : Arrêt du tribunal judiciaire de Melun du 12 mai 2020 – Tribunal judiciaire de Melun, 12 mai 2020, n°19/00262
Changement de statut : anticiper les évolutions de garanties en prévoyance
Il faut faire attention aux évolutions de garanties prévoyance lorsque l’on passe d’un statut d’assimilé-salarié à un statut d’indépendant. Les prestations versées en cas d’incapacité, d’invalidité ou de décès diffèrent en effet selon les statuts. Le changement de statut est une opération complexe et longue, qui doit se faire avec l’aide de son expert-comptable et de son conseiller APICIL.
Le saviez-vous ?
Mon contenu…L’abandon du statut d’assimilé-salarié ne doit pas se faire sans avoir vérifié certains points avec son organisme assureur :
- en cas de changement de statut, le dirigeant passe d’un contrat collectif à un contrat individuel Madelin : il est nécessaire de s’assurer que l’organisme assureur va accepter la couverture avant de résilier son ancien contrat
- regarder s’il existe des conditions d’exclusion : les soucis de santé, tels que l’hypertension ou les problèmes lombaires, peuvent entraîner l’exclusion de certaines personnes du bénéfice d’un contrat. C’est aussi le cas pour les pratiquants de sports à risques (escalade, plongée sous-marine, parapente, etc.)
- être vigilant au délai de carence, plus ou moins long selon les contrats : il s’agit de la période qui suit la souscription du contrat durant laquelle l’assuré cotise sans bénéficier de remboursements
- regarder l’assiette de calcul des prestations : par exemple, prend-elle en compte les dividendes ?
Prévoyance : comparatif des prestations entre un dirigeant de SARL et un président de SAS
Si les prestations prévoyance versées aux assimilés-salariés sont en moyenne plus élevées que celles versées au gérant majoritaire de SARL, elles ont un coût. Les charges sociales sont ainsi plus élevées pour les présidents de SAS, qui ont donc un revenu disponible plus faible que les indépendants.
Prenons l’exemple d’un dirigeant ayant un résultat avant prélèvements de 60 000 €. Dans les deux cas, il est marié avec deux enfants. Le salaire brut du président est de 46 000 €, la rémunération brute du gérant majoritaire est de 36 000 €. Des dividendes sont réintégrés dans l’assiette sociale de ce dernier.
Pour les TNS, tout l’enjeu va être dans l’indispensable reconstitution des prestations : grâce aux contrats individuels de santé et prévoyance, déductibles fiscalement, les gérants majoritaires peuvent se doter d’une protection « à la carte », en fonction de leur situation familiale, de leurs contraintes, etc. La marge de manœuvre dont ils bénéficient est plus grande que les assimilés-salariés, et donc intéressante.
Source : Infographie “Statut du dirigeant”, chiffres issus d’une simulation réalisée par le logiciel de la société Factorielles, présidée par Bruno Chrétien.
Info marché
La loi Madelin permet aux indépendants de se constituer une protection sociale complémentaire (santé, prévoyance), tout en bénéficiant d’une réduction d’impôt. En effet, les cotisations versées dans le cadre d’un contrat de complémentaire santé ou de prévoyance sont déduites de leur bénéfice imposable dans une certaine limite. Le contrat APICIL TANDEM est éligible à cette fiscalité avantageuse.