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Loi Évin en prévoyance : définition, obligations de l’employeur et de l’assureur

5 minutes
Saviez-vous que la Loi Évin concerne également la prévoyance ? Cette loi comporte près de 13 articles sur les régimes collectifs de prévoyance. Définition de la prévoyance, obligations de l’employeur mais aussi de l’assureur… Pascal Ronzon, expert en protection sociale, décrypte les textes de cette loi.

Sommaire :

La Loi Évin, du nom du ministre de la solidarité et de la Protection Sociale dans le gouvernement de Michel Rocard en 1989 est un texte réglementaire de 31 articles répartis en 4 chapitres, promulguée le 31 décembre 1989. L’article le plus connu de cette loi auprès du grand public et des entreprises est l’article qui organise la conservation de sa mutuelle d’entreprise après avoir quitté son travail pour partir à la retraite.

Pour autant, la loi s’intéresse principalement à la prévoyance et à la protection des assurés sur les risques décès, incapacité temporaire de travail et invalidité. Treize articles portent sur les régimes collectifs de prévoyance ! Pourquoi autant d’articles sur la prévoyance ? C’est que jusqu’en 1989, elle n’était ni définie ni encadrée car il n’existait pas jusqu’alors d’obligations légales. La portée de ces 13 articles encadre les obligations de l’employeur et donne par la même occasion la définition de la prévoyance utilisée en assurance collective.

Protection des salariés en prévoyance : la Loi Évin, un texte fondateur

Pascal RONZON, expert en protection sociale (APICIL Santé Prévoyance)

Le contrat d’assurance collectif de prévoyance complémentaire est particulier dans sa forme puisqu’il est tripartite (il s’agit d’une stipulation pour autrui : en signant le contrat, l’entreprise a stipulé au profit de ses salariés). Le salarié bénéficiaire du contrat n’est pas le souscripteur, c’est-à-dire n’est pas celui qui signe l’adhésion au contrat. Le contrat s’impose à lui, puisqu’il est mis en place par l’employeur, souscripteur du contrat. Cette particularité de l’assurance collective est unique et a nécessité que le législateur se penche tant sur la clarification du rôle de l’employeur que sur le fait de renforcer la protection des salariés bénéficiaires.

La Loi Évin est la première loi de protection des salariés en prévoyance. En cela, cette loi est un texte fondateur car il est le premier texte qui fixe un cadre relatif à l’assurance collective de prévoyance qui vient limiter la liberté contractuelle des parties (assureur, entreprise, salariés). Un autre texte réglementaire suivra 5 ans plus tard. Ce sera la loi du 8 août 1994. Mais revenons à la loi Évin. Elle est toujours en vigueur 32 ans après l’adoption du texte par l’Assemblée Nationale et le Sénat.

Le législateur a été obligé également de clarifier le rôle de l’assureur. Il était nécessaire de définir ce que l’on entend par la prévoyance et de dire quel est le contenu de la prévoyance. Le rédacteur de la loi s’attache à définir donc le terme. La prévoyance correspond à trois risques :

  • le décès,
  • l’incapacité temporaire de travail,
  • et l’invalidité.

Relatif aux salariés, la loi énonce une disposition d’ordre public, celle de la protection. Cette protection s’impose à tous les bénéficiaires d’un régime de prévoyance. Le cadre étant ainsi posé, des règles se mettent en place pour organiser la disposition de la protection. C’est tout l’objectif du texte de loi.

Contrat de prévoyance : les obligations de l’entreprise et de l’assureur

La Loi Évin organise des dispositions qui s’imposent à tous ( employeur-assureurs) en vue de mieux protéger le bénéficiaire du contrat notamment :

  • mieux prévoir les situations des personnes bénéficiaires des prestations en cas de résiliation du contrat d’assurance ;
  • pour l’informer de ses droits.

Ces deux items constituent les deux grands axes de la Loi Évin.

Prévoyance : les articles 1 à 16 de la Loi Évin (n° 89-1009) du 31 décembre 1989

Prévoyance (risque décès, incapacité de travail, invalidité)

  • Article 1 : validation des organismes habilités à mettre en œuvre des opérations de prévoyance complémentaires. Tous les acteurs de la protection sociale (mutuelles, institutions de prévoyance, assureurs…) sont concernés.

Prévoyance et contrat collectif

  • Article 2 : obligation de la prise en charge des suites pathologiques antérieures à la souscription du contrat. L’assureur a l’obligation de prendre la totalité du collège des personnes ou personne.
  • Article 7 : le maintien du montant des prestations payées, au niveau atteint en cas de résiliation ou de non-renouvellement du contrat par l’assureur. Obligation de constituer des provisions pour maintenir ces prestations.
  • Article 7-1 : lorsque le contrat d’assurance comporte les garanties décès/incapacité/invalidité, il y a obligation de maintenir la garantie décès aux bénéficiaires, en cas de résiliation du contrat ou du non-renouvellement de la garantie décès.
  • Article 11 : un salarié ne peut pas être contraint à cotiser contre son gré à un contrat prévoyance mis en place par Décision Unilatérale de l’Employeur (DUE) sauf embauche du salarié postérieure à la mise en place du contrat.
  • Article 12 : obligation est faite à l’assureur de remettre une notice détaillée à l’employeur. Cette notice définit les garanties. Si réduction des garanties, nécessité d’une information préalable par écrit des salariés.
  • Article 13 : le comité sociale et économique (CSE) peut faire des propositions pour améliorer le niveau de couverture.
  • Article 14 : information et consultation du CSE avant la mise en place ou la modification des garanties.
  • Article 15 : l’organisme assureur doit fournir un rapport annuel chaque année au souscripteur du contrat.
  • Article 16 : À la demande du CSE ou d’un salarié élu, l’employeur doit fournir le rapport d’information prévu à l’article 15.

Incapacité de travail ou d’invalidité, risque chômage et décès

Article 6 : Après l’expiration d’un délai de 2 ans calculé à partir de la date de souscription, l’assureur ne peut augmenter ses tarifs ou réduire les garanties du contrat en se fondant sur l’état de santé de l’assuré.

Le maintien de la prévoyance en cas de résiliation du contrat d’assurance (article 7 de la Loi Évin)

L’entreprise peut changer de contrat d’assurance selon ses besoins : niveaux de couverture recherchés, changement de convention collective applicable… Mais que deviennent les bénéficiaires du contrat dans la situation où l’employeur change d’organisme assureur ?

Le maintien de la prestation constitue l’un des apports importants de la Loi Évin. La loi oblige l’assureur à maintenir la prestation en cours de versement (indemnités journalières, rente d’invalidité) en cas de rupture du contrat d’assurance par l’entreprise.

En cas de changement d’assureur

  • L’employeur doit s’assurer que les salariés bénéficiaires de prestations ne peuvent pas faire l’objet d’une baisse de leurs indemnisations.
  • Les prestations doivent être maintenues au niveau atteint par l’ancien assureur (article 7 de la Loi Évin). Autrement dit, l’assureur ne peut pas décider d’arrêter le versement de la prestation (indemnités journalières, rente d’invalidité) parce que le contrat est résilié. La prestation cesse d’être payée par l’assureur à l’échéance de la durée d’indemnisation définie par le contrat résilié. C’est ainsi que l’assureur peut continuer à payer une rente d’invalidité par exemple, pendant des années après la rupture du contrat puisque cette rente doit être payée jusqu’au jour de la liquidation des droits à la retraite du salarié invalid

Cet article 7 est complété par l’article 7-1

Le maintien de la garantie décès pour les personnes bénéficiaires de prestations incapacité et invalidité devient une obligation lorsque le contrat d’assurance est résilié ou non renouvelé.

Ce maintien de la garantie décès s’accompagne d’une donnée économique : la constitution d’une provision obligatoire, c’est-à-dire de faire financer d’avance la prestation par l’entreprise souscriptrice du contrat. Cette somme d’argent est gardée par l’assureur du contrat de prévoyance résilié. Ce dispositif applicable au contrat collectif est d’ordre public. Il s’impose au souscripteur (l’entreprise).

L’obligation d’information (article 12 de la loi Évin)

L’article 12 de la Loi Évin est le deuxième apport important de cette loi. Cet article consiste à la remise d’une notice détaillée des garanties aux salariés. Lorsqu’un régime de prévoyance est souscrit, l’assureur est tenu aux obligations d’information. C’est donc lui qui rédige et établit une notice d’information. Ce document doit être clair et détaille les garanties prévues au contrat et les modalités d’application. En revanche, l’employeur a l’obligation de remettre cette notice à chacun de ses salariés.

Cette obligation englobe le fait que toute modification du contrat concernant un droit de l’assuré doit être portée à sa connaissance. C’est le cas par exemple de :

  • la modification des exclusions,
  • la modification de la définition des bénéficiaires,
  • ou encore des modalités de demande de la prestation.

Si un délai est mis en place par exemple par l’assureur pour effectuer la demande de la prestation comme cela peut être le cas sur les demandes des indemnités journalières complémentaires à la Sécurité sociale, la modification de ce délai doit être signalée aux salariées à la connaissance des salariés.

Cas d’usage d’une obligation d’information

Pour illustrer cet exemple, prenons la situation de la déclaration d’un arrêt de travail de l’employeur auprès d’un assureur. Ce délai ne fait pas l’objet d’une réglementation.

Certains assureurs ont une règle de gestion relative à cette déclaration qui leur est propre.

La déclaration doit être effectuée dans un délai défini.

Par exemple, le délai déclaratif est de 60 jours. Pour le Groupe APICIL, ce délai déclaratif est de 30 jours.

Pour reprendre notre exemple de cette règle de gestion, toute modification de la règle nécessite d’en informer le salarié. Et si ce délai vient à être réduit à l’initiative de l’assureur, la réduction du délai déclaratif oblige l’entreprise à en informer son salarié.

Quelles conséquences pour l’entreprise ?

La Loi Évin crée de nouvelles obligations pour le souscripteur du contrat collectif. Elle renforce la protection du salarié notamment sur le champ de l’information et du maintien des prestations en cas de résiliation du contrat d’assurance. Ces nouvelles obligations ont des répercussions économiques pour l’entreprise. L’entreprise doit supporter le coût économique du maintien de la garantie décès par la constitution de provisions.

La prise en charge de la Loi Évin n’a pas été abordée dans cet article. Il s’agit de la prise en charge des suites pathologiques antérieures à la souscription d’un nouveau contrat de prévoyance qui fera l’objet d’un prochain article !

Pour en savoir plus : L’indemnisation des arrêts de travail en cas de résiliation et changement d’assurance prévoyance

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